Cette synthèse de données probantes a été compilée par des membres du secrétariat du GTIC et ne représente pas nécessairement l’opinion de tous les membres du GTIC.

par Alexis Palmer-Fluevog

Le milieu de la santé publique a toujours fait l’objet de critiques. Sur la scène mondiale, les pouvoirs des administrateurs de la santé publique varient et, traditionnellement, le système judiciaire américain a respecté et maintenu les décrets sanitaires. Dans un article du New England Journal of Medicine, la Pre Mello et ses collègues expriment leurs inquiétudes à l’égard du nombre croissant de contestations judiciaires des décrets sanitaires sur la COVID-19 aux États-Unis.

Les administrateurs de la santé publique des États-Unis et du Canada ont imposé des mesures d’atténuation considérables pour préserver la sécurité des localités et limiter la propagation de la COVID-19. Ils les ont mises en vigueur grâce aux pouvoirs qui leur sont conférés aux autorités sanitaires par le gouvernement. Ces mesures visent à protéger les localités des risques de la COVID-19, mais certains s’y opposent. D’innombrables poursuites ont été intentées aux États-Unis afin de contester des décrets qui ont entraîné la fermeture d’entreprises, l’interdiction des services religieux à l’intérieur, la restriction des voyages et l’obligation du port du masque.

Par le passé, les tribunaux ont été respectueux des décrets sanitaires, et ce depuis l’obligation vaccinale décrétée il y a plus de cent ans. Au début de la pandémie, les tribunaux ont rejeté la plupart des contestations judiciaires aux décrets d’urgence liés à la COVID-19. Toutefois, alors que la pandémie s’étire, les systèmes judiciaires des États-Unis (en particulier) se sont montrés plus réceptifs aux contestations portant sur la liberté religieuse et l’ampleur du pouvoir exécutif.

Les causes récentes à l’égard desquelles les tribunaux ont donné raison aux requérants plutôt qu’aux recommandations des Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis créent un précédent et représentent de nouveaux obstacles à la protection du public par les administrateurs de la santé publique. Les auteurs de l’article se demandent quel sera l’effet de ces décisions judiciaires sur les décrets d’obligation vaccinale et les autres lois en matière de santé publique. Les tribunaux qui acceptent que ces causes ne soient pas contestées s’éloignent radicalement d’une décision de la Cour suprême des États-Unis de 1905, qui a maintenu un décret d’obligation vaccinale et insisté sur le fait que la protection sanitaire était la responsabilité première des élus et des experts à qui ils délèguent leurs pouvoirs.

Les auteurs soulignent le potentiel de répercussions négatives de la décision de la Cour suprême à l’égard des pouvoirs des CDC. La Pre Mello et ses collègues réclament que le Congrès énonce clairement qu’il entend conférer des pouvoirs plus vastes aux administrateurs de la santé publique, afin d’éviter de réduire les CDC à l’impuissance, particulièrement en contexte de crise de santé mondiale. Même si les auteurs s’intéressent à la situation des États-Unis, cet enjeu touche aussi le Canada. La santé publique devrait être un enjeu non partisan partout dans le monde.

 

Mello MM, Parmet WE, 2021. Public Health Law after Covid-19. New Eng J Med. doi : 10.1056/nejmp2112193