Par Kristin Davis
La Suède adopte une approche différente envers les restrictions liées à la COVID-19 dans les écoles
En mars 2020, des écoles du monde entier ont fermé leurs portes, et la rumeur tapageuse des jeunes dans les classes et les cours d’école a été remplacée par un silence étrange qui en est venu à caractériser les premières semaines de la pandémie de COVID-19. Près d’un an plus tard, les cours ont repris dans de nombreuses classes, malgré d’importantes adaptations aux activités quotidiennes, telles que le lavage des mains plus fréquent, la distanciation physique et le port du masque, dans l’espoir de juguler la propagation du SARS-CoV-2, le virus responsable de la COVID-19. Tant les milieux scientifiques que gouvernementaux se posent la même question : « Les bienfaits pour l’apprentissage et le développement des enfants transcendent-ils le risque de propagation accrue du virus découlant de l’ouverture des écoles? »
Le printemps dernier, la Suède a été l’un des rares pays (conjointement avec le Nicaragua et Taïwan) à ne pas annuler les cours en classe pour les élèves jusqu’à la 9e année, alors que le deuxième cycle du secondaire (de la 10e à la 12e année) est passé à l’apprentissage à distance. Dans l’ensemble, l’apprentissage en classe s’est poursuivi sans changement majeur, sans mesures de précaution telles que la diminution de la taille des classes, le port du masque et même l’isolement des cas de COVID-19 connus ou présumés. La Suède, devenue une espèce « d’expérience naturelle non contrôlée » en raison de sa décision de fermer partiellement les écoles secondaires, a représenté une occasion unique de mesurer les répercussions de la fermeture des écoles sur la dynamique de transmission du SARS-CoV-2.
Dans un article publié ce mois-ci, en anglais, des chercheurs suédois ont découvert que la décision de ne pas fermer les écoles a doublé l’incidence d’infections par le SARS-CoV-2 confirmées par PCR chez les enseignants du premier cycle du secondaire (7e à 9e année) par rapport à ceux du deuxième cycle, qui enseignaient à distance. Cette tendance correspond à l’observation selon laquelle le risque d’infecter l’enseignant est proportionnel à l’âge de l’élève. En effet, les enseignants du premier cycle du secondaire se classaient au septième rang des groupes professionnels les plus à risque (à l’exclusion des travailleurs de la santé) de la Suède, après les policiers, les travailleurs sociaux et les chauffeurs de taxi. De plus, les auteurs soulignent que 79 des quelque 39 000 enseignants du premier cycle du secondaire ont été hospitalisés en Suède à cause d’une COVID-19 grave, et l’un d’entre eux est décédé. D’après le taux de cas selon l’âge, ils estiment que jusqu’à 33 de ces hospitalisations auraient pu être évitées si les écoles avaient adopté l’apprentissage en ligne.
L’étude a notamment démontré que le risque accru d’infection chez les enseignants du premier cycle du secondaire était partagé par leurs conjoints, qui ont présenté une incidence d’infection par le SARS-CoV-2 confirmée par PCE plus élevée que les conjoints des enseignants du deuxième cycle du secondaire. Fait remarquable, les parents des élèves des premier et deuxième cycles du secondaire n’ont pas présenté d’augmentation ou de différence marquée des taux d’infection.
On ne sait toujours pas dans quelle mesure le risque accru pour les conjoints des enseignants découle d’une propagation des élèves aux enseignants ou entre enseignants. Les auteurs ajoutent que le maintien des élèves de 7e à 9e année en classe a eu peu d’effets sur la transmission globale de la COVID-19 dans la communauté, mais leur rapport établit clairement que les enseignants, et particulièrement les enseignants des adolescents, courent un risque plus élevé d’infection. Étant donné la menace omniprésente des nouveaux variants, il est essentiel d’adopter des interventions non pharmaceutiques rigoureuses, comme le port d’équipement de protection individuelle, pour assurer le contrôle optimal de la COVID-19 dans les écoles. De même, il faut évaluer soigneusement l’ordre des enseignants dans la priorisation de la vaccination.
Une élégante étude de modélisation a également été publiée ce mois-ci, en anglais, sur les divers scénarios de réouverture des écoles en fonction de l’expérience vécue d’une épidémie dans la région française de l’Île-de-France pendant la première vague de la pandémie. Les chercheurs démontrent que la réouverture simultanée de tous les niveaux de scolarité (préscolaire, primaire, intermédiaire et secondaire) peut pousser la capacité des unités de soins intensifs à l’extrême, tandis que la réouverture progressive des niveaux préscolaire et primaire, suivie des niveaux intermédiaire et secondaire, conjointement avec l’adoption universelle et rigoureuse d’interventions non pharmaceutiques, peut assurer une réouverture sécuritaire tout en contenant la pandémie. Bien qu’elles soient clairement distinctes, ces deux études démontrent que le risque de maintenir les écoles ouvertes n’a pas le même effet dans tous les milieux d’enseignement et qu’une réouverture graduelle, à commencer par le préscolaire et le primaire, constituerait peut-être la meilleure démarche pour garantir la sécurité de tous les intervenants du milieu de l’éducation.
Ce que fait le GTIC pour contribuer à comprendre la propagation du SARS-CoV-2 dans les écoles canadiennes
Le Groupe de travail sur l’immunité face à la COVID-19 (GTIC) finance plusieurs initiatives pour retracer la propagation de la COVID-19 dans les divers secteurs de l’éducation. Le projet EnCORE, actuellement en cours dans le Grand Montréal, évalue l’incidence d’infections par le SARS-CoV-2 chez les enfants et les adolescents des milieux de garde et des écoles primaires et secondaires. Quant à l’étude SPRING, elle vise à déterminer le nombre d’enfants et de jeunes adultes britanno-colombiens qui ont été infectés par le SARS- CoV-2. Plus récemment, le GTIC a annoncé le lancement de deux études sur la transmission du SARS-CoV- 2 et l’immunité à ce virus sur deux campus universitaires différents; une troisième étude financée par le GTIC sur un campus universitaire sera révélée plus tard cette semaine. De plus, le GTIC annoncera sous peu trois autres études sur la transmission du SARS-CoV-2, son immunité et l’efficacité des vaccins chez des enseignants de divers milieux d’éducation au Canada. Ces études contribueront à jeter la lumière sur la portée de la transmission du SARS-CoV-2 dans les écoles canadiennes, ainsi que sur ses répercussions sur la santé et le bien-être des élèves, des enseignants et du personnel du milieu de l’éducation.